CASS-TETE yaoi
Le lendemain, je vire, je tourne. Je me sens oppressé. J’ai l’impression que les heures défilent à toute vitesse.
« C’est l’heure, Tom. Viens te préparer »
Je n’arrive pas à chasser cette boule qui s’est nichée au fond de ma gorge et qui me gène pour respirer.
Maki nous sert de chauffeur. Il me file une tape sur l’épaule en signe d’encouragement. Je dois vraiment faire une drôle de tête…
Il y a beaucoup de monde sur ce petit caillou. Candice me tient par la main tandis que nous allons rendre nos hommages à la maîtresse de maison.
« Mes amis, soyez les bienvenus ! »
Décidemment, cette femme m’insupporte.
« Dita chérieee !! »
Candice aussi m’insupporte…
« Tom ! Quelle bonne surprise ! »
« Tout le plaisir est pour moi. Tenez, un modeste présent »
« Une surprise ! J’adore les surprises !! » Et elle ouvre l’album que j’ai fait spécialement pour elle. Au fil des pages, je vois son sourire se forcer et carrément se figer lorsqu’elle tombe sur la photo du bureau sur lequel trône mon fils.
« N’est-ce pas une surprise ? »
Elle me regarde. Elle a compris mais les hostilités ne sont pas encore lancées. Elle se recompose un visage souriant et répond :
« Bill a toujours adoré son enfant. Il est normal que sa photo soit sur son bureau »
C’est Candice qui me retient et tente une diversion :
« J’aperçois Fio. Allons la voir » et elle m’entraîne de force.
Dès que l’on s’est éloigné, elle murmure :
« Va falloir que tu te calmes. La soirée ne fait que commencer. Les surprises aussi et ce soir, je ne sais pas si elles seront toutes à ton goût »
« Pourquoi elle a dit que le bureau est à Bill ?!! Hein, pourquoi ?et c’est quoi ce délire avec –bill a toujours adoré son fils- ???!!! il ne l’a pas connu !! il est mort avant sa naissance !! c’est quoi ce bordel ? »
Candice se tait.
Fiona, toujours somptueuse.
« Tom, comment vas-tu ? As-tu trouvé des réponses ? »
« … Je ne comprends plus rien, Fio. Vraiment plus rien. Faute d’avoir trouvé des réponses, c’est une foule supplémentaire de questions qui m’arrivent en pleine face »
« Allez, viens »
On s’installe à l’écart de l’agitation.
« Au début, j’ai fait comme toi. J’ai pris pour argent comptant tout ce que l’on me disait. Avec le chagrin, oui, la mort de Bill m’a affecté, et puis tout ce que tu étais incapable de gérer et que j’ai dû faire à ta place, je n’ai pas eu de temps pour réfléchir. Puis, la première chose qui m’a tracassé, c’est lorsque l’on m’a dit qu’il n’y avait pas de corps. Rien. Ni Bill, ni le pilote. C’est à partir de là que j’ai mis Candice sur le coup. En enquêtant, elle a appris que ce jour-là, aucun avion n’était attendu à Malé à cette heure-là. Elle a aussi appris que Bill, ne voyageait pas seulement pour son travail. Il rendait visite à Dita… »
« Dita ?! Fio, tu te rends compte de ce que tu me dis ? »
« Simplement ce que Candice à découvert »
« Tu sous-entends qu’il me trompait avec cette truie ? »
« Je ne sous-entends rien. Je te relate les faits. Et oui, elle a des preuves de ce qu’elle avance »
« C’est pas possible… »
« En continuant ses investigations, elle a constaté que ses comptes bancaires n’avaient pas été clos et qu’il y avait des mouvements dessus. »
« Quoi ?! »
« Que deux comptes avaient été ouverts, l’un pour Bill jr et l’autre pour Cindy, et que l’argent provenait du compte de Bill. A chaque pas de son enquête, elle était confrontée à Bill. Il était toujours présent. Au début, elle a cru que c’était Dita, mais non. C’était bien Bill.»
« Bill ? Non, mais c’est quoi ce délire ? »
« Les coquillages au cimetière, c’est lui. »
« Le gardien m’a parlé d’une femme. J’ai cru que c’était toi »
«Tom…ne t’est-il jamais arrivé de prendre Bill pour une femme ? »
Je pâlis en repensant à cette fameuse scène au restaurant.
« Tu vois, il a fait comme toi. Si tu lui avais demandé, si parfois, une personne l’accompagnait, il t’aurait décrit celle qui nous reçoit ce soir même…Dita…en la prenant pour sa mère… »
« C’est un truc de malade ce que tu me racontes là ! Bill m’aurait abandonné pour Dita ? Il se serait fait passer pour mort ? Y’a un truc qui cloche…ça va pas cette histoire. Il lui suffisait de me quitter, c’était plus simple, non ? »
« Je ne sais pas…»
Cette nouvelle m’a sonné. Ce n’est pas possible…Bill n’aurait jamais agit de la sorte. Candice se trompe.
***
C’est la voix de cette pouffiasse que me ramène sur terre.
« Mes amis ! Mes très chers amis ! Approchez ! Approchez ! Ce soir, vous êtes ici pour partager mon bonheur. Allez, venez ! Approchez ! »
La foule dispersée se compacte autour de la maîtresse de maison, juchée, pour l’occasion, sur une estrade.
« Mes amis, je ne vous présente plus mon …fiancé ! » à ces mots un tonnerre d’applaudissement « hé, oui ! Vous êtes ici pour célébrer nos fiançailles. Bill, chéri, allez, viens. Viens me rejoindre, mon chéri...Notre amour a affronté pas mal de tourmentes, mais le pire moment de ma vie, fût ce jour où j'ai crû l'avoir perdu à jamais. j'ai mis en oeuvre toute mon énergie pour le retrouver, et quand des pêcheurs m'ont dit qu'ils avaient trouvé un homme, j'ai accouru, et il était là. Il ne se souvenait plus de rien, mais lorsque je me suis approchée de lui, il a murmuré mon prénom, et à cet instant, j'ai su que plus rien, ni personne ne nous séparerait »
Toujours ce tonnerre d’applaudissement qui éclate dans ma tête et la rombière qui me fixe triomphante tandis que Bill la rejoint sur l’estrade. Je suis pétrifié. C'est quoi ces conneries qu'elle nous sert? elle croit que je vais gober son barratin?
Dans la foule s’élève une clameur :
« Le mariage ! Le mariage ! »
« Mes amis ! Nous avons prévu cela pour cet été, ici même ! N’est-ce pas un beau scoop, ma chère Fiona ? »
Fiona acquisse en soulevant sa coupe de champagne. La rombière continue à déblatérer sur l’amour, si elle savait que son mec était en train de me baiser hier soir, je ne suis pas sûr qu’elle parlerait encore mariage. J’ai envie de l’éclairer sur sa situation mais je trouve qu’elle n’en vaut pas la peine et qu’ils forment un sacré couple d’enfoirés. Je saisis mon paquet de clopes dans le mini sac de Fio, et je vais méditer sur l’amour et le mariage, seul sur la plage.
Assis sur
le sable. Eclairé par des torches. Je fume. Je suis rejoins par Bill. Il s’agenouille derrière moi, passe ses bras autour de mes épaules. Je sens qu’il tripote mes dreads. Toujours cette sale
manie. Je suis incapable de parler. Trop de questions se bousculent dans ma tête. Il me murmure un « je t’aime » puis se relève et va rejoindre sa future femme.
***
Fiona. Je pars à sa recherche. Elle est là, avec la masse des invités. Elle parle, elle sourit. Je vais la rejoindre. Arrivé à sa hauteur, je dépose un baiser sur son épaule, elle me regarde, surprise.
« Tu es somptueuse »
Elle me sourit. Je suis littéralement absorbé par ses longs cheveux noirs. Je passe mes doigts dans cette masse soyeuse. Peu m’importe qu’elle soit en pleine conversation avec d’autres personnes. Je fais glisser des mèches dans le creux de ma main, pour les laisser ensuite se répandre et rejoindre le reste de sa chevelure. Un peu plus loin, sur la piste de danse, quelques couples. Je prends sa main et l’entraîne.
« Tom, je suis en train parler… »
« Viens, cela fait une éternité que je n’ai pas dansé »
Elle ne résiste pas longtemps. On danse, collé l’un à l’autre. Ses cheveux sont parfumés. A chacun de ses mouvements, je sens leur parfum. Alors qu’elle veut parler, je l’embrasse. Je n’en ai pas envie. Pas ce soir. Pas maintenant. Elle va encore croire que je fuis. Tant pis. Je préfère remettre les explications à plus tard. Lorsque je serai prêt à affronter Bill. Je danse, mon corps tellement prés du sien que je sens son cœur battre contre ma poitrine. Je l’entrainerai bien sur la plage mais je sais qu’elle va refuser.
« Je rentre demain à Paris, avec l’avion privé de Dita. Tu comptes rentrer quand ? »
« Dés que j’ai une place sur un vol »
« Parfait »
« J’ai envie de t’embrasser…et de te baiser… »
« La musique s’est arrêtée. On se retrouve à Paris »
« Oui. À Paris. Je vais rentrer maintenant. Tu préviens Candice que j’ai regagné le bungalow.»
« Candice rentre avec moi demain »
« Ok »