CASS-TETE yaoi
Des bruits de voix. Je suis contre Lucas. L’odeur de sa peau. L’odeur du chocolat chaud. Des bruits de plateaux. De charriots qui roulent dans les couloirs. J’ouvre un œil. La peau de Lucas.
« Mmm… »
« C’est les plateaux du p’tit déj. J’ai faim »
Je me redresse.
« C’est quoi ? »
« Chocolat. J’en avais envie »
« J’aime pas. Je veux du café. »
« J’ai trop faim, faut que j’mange »
Il s’est assis. Il boit le chocolat chaud d’un trait. Se jette sur les malheureuses biscottes qu’il engloutit après les avoir beurrées et nappées de confiture. Le contenu de son plateau disparait en quelques minutes. Je viens de comprendre que mon p’tit déj va subir le même sort. J’en ai la preuve un moment plus tard. Pendant qu’il dévore, je passe sous la douche. Entre-temps, la personne qui s’occupe des p’tit déj est revenue. Lucas lui explique qu’il a tout mangé tant il était affamé. Il voudrait bien qu’elle me rapporte quelque chose. Elle sort pour revenir avec un plateau. Elle s’excuse en disant qu’il ne lui reste que ça. Je la remercie. Du chocolat chaud. Je grimace. Lucas sourit. Je lui tends le bol.
« Tu as encore faim ? »
« Oui »
Je lui donne mon plateau. Les biscottes, très peu pour moi. Je rêve d’un café au lait et de brioche. Tout ce que je n’aurai pas. Une infirmière passe nous voir. Elle m’informe que je sors ce matin, dès que le docteur m’aura examinée.
« Et Lucas ? »
« Plus tard »
Je n’ai pas fini de la questionner qu’elle repart déjà. J’observe Lucas engloutir les biscottes. Faute de café au lait, je me rabats sur mes clopes. De bon matin, le ventre vide. J’en ai un haut-le-cœur.
« J’descends téléphoner à ma mère pour qu’elle vienne me chercher »
Hochement de tête car bouche pleine.
En bas, il caille. Je sautille pour ne pas geler sur place.
« Maman ? »
« … »
« Je sors vers 10h. Tu viens me chercher ? »
« … »
« Bisous »
Je remonte vite me mettre au chaud. Il est sous la douche. La perf pend dans le vide. Je souris. Elles vont péter les plombs les infirmières avec lui. Mon regard tombe sur deux cookies posés sur la table de chevet. Il y a aussi un verre de jus d’orange. Je passe la tête dans la salle de bain :
« C’est pour qui les gâteaux ? »
« Pour toi »
« Et le jus d’oranges ? »
« Pour toi aussi »
« Wow !! »
Je retourne vite manger les cookies et boire le jus d’oranges.
« C’était bon ? »
« Oui. Comment s’est arrivé là ? »
« J’suis allé trouver les infirmières. Ce n’est pas un bureau qu’elles ont, c’est un véritable garde-manger. Je leur ai expliqué que j’avais dévoré ton p’tit déj et que je voulais me faire pardonner »
« Merci »
Je pars me brosser les dents. A mon retour, Lucas est assis sur son lit, il a allumé la télé. Il regarde des dessins animés. Je m’assois à côté de lui. J’ai horreur des dessins animés. La tête posée sur son torse, je me rendors.
« Vicky »
J’émerge lentement. Le docteur se tient devant nous. Après quelques examens de routine, je suis libre. Un moment plus tard, ma mère frappe à la porte puis entre. Elle est souriante. On lui rend ses sourires. J’ai déjà ramassé mes affaires. Elle sort la première de la chambre. Je lui dis que je la rejoins en bas. C’est bizarre cette sensation de laisser Lucas tout seul dans cette chambre d’hôpital. Je me penche pour l’embrasser sur la bouche. Juste un bisou mais, sa main emprisonne mon cou. Sa langue vient dans ma bouche. La surprise fait place au désir. Instantanément je sens mes seins se durcir. J’en prends d’autant plus conscience que c’est la première fois que je ressens un truc pareil. Le désir qui me submerge pendant un baiser…un baiser avec Lucas. Je n’arrive pas à me détacher de sa bouche. C’est la visite d’une infirmière qui nous sépare contre notre gré.
« Vous êtes dans un hôpital »
Pour toute réponse, Lucas lui hurle :
« Dégages ! »
On l’entend partir en râlant.
Il ne m’a pas lâché. Sa main libre s’est logée entre mes cuisses. À son contact, un gémissement s’échappe de mes lèvres. Puis, il prend ma main et la glisse sous le drap. Sur son sexe en érection.
« Ta mère t’attend »
Une claque ne m’aurait pas fait revenir plus vite sur terre. Je me redresse et je quitte la pièce sans me retourner. Dans le couloir, je vois Paul. On se croise sans un mot.
L’une qui part, l’autre qui arrive.
Ce n’est qu’un échange.
Une fille contre un garçon.