Mercredi 14 mars 3 14 /03 /Mars 20:11

 

 

 

 

 

Cette partie est écrite par Chester et postée en simultané sur son blog (link)

 

carl-photo

 

 

 

Le jour avant...

 

-Ahahah… Tu… Tu te moques de moi, c’est ça ?

J’ai mon thé suspendu entre mes lèvres et la table. Un rire nerveux lui me crispe le visage tandis que mon vieil ami Carl vient de m’exposer les faits. Bizarrement, un silence me répond, rien qu’un silence, lourd, pesant.

-Tu te moques de moi, j’insiste.
-Tu as besoin d’argent.
-Et depuis quand tu fais dans le proxénétisme ?

Nerveux et tendu, je suis en train de maudire Carl, un tic secouant ma lèvre, crispé.

-Arrêtes un peu, je ne te parle pas d’être sa catin. Juste son fiancé, tu devras juste aller aux meetings avec lui histoire que son image remonte un peu.

C’en est trop, je pose brutalement mon verre sur la table, renversant au passage du thé que Carl observe d’un air contrarié. Les cheveux légèrement ébouriffé de colère, Je pousse un grognement puis finit par me rasseoir, les bras croisés sur le torse, la tête sur le côté.

-Hors de question ! Je refuse. Niet, nada, no. Non, non, non et non !
-Comme tu veux, fait Carl en inspirant calmement.

Il étend sereinement ses jambes, ce que j’entends et pendant ce petit silence, Je sais très bien que cela n’augure rien de bon… Que Carl lâche une affaire si rapidement et facilement n’est jamais bon signe : il a quelque chose en tête.  Du coup, ce n’est pas très rassuré que j’écoute la suite.

-Sinon ça va ? Tu as réglé ton soucis pour ta taxe d’habitation ?
-… Pas encore…
- Et ton loyer en retard ?
-J-j’attend les revenus de l’employeur de la dernière fois…
-Celui d’il y a 4 mois ?
-Carl arrête je sais parfaitement ou tu veux en venir ! Je ne m’abaisserais pas à faire la boniche de ce type ! Je le connais même pas !
-Oui, oui je sais…

Carl sourit et pose ses coudes sur la table, évitant soigneusement le thé étalé dessus.

-Et le prêt pour ton violon ?

Il allait trop loin, j’explosais presque.

-Arrêtes j’ai dit, là tu deviens vraiment lourd ! Tu me proposes ça comme un plan génial ! Comme si ça allait tout régler en un mois ! Tu pourrais pas plutôt me prêter de l’argent et que je te le rembourses au fur et à mesure j’en sais rien, plutôt que de me proposer un contrat pour faire semblant d’être la chaussette d’un mec qui fait sa campagne politique !
-Tu ne pourrais pas me rembourser, tu n’as pas d’argent, fit remarquer Carl, mais je l’écoute à peine et continue sur ma lancée.
-Et puis quoi hein ? Je le connais pas ! Si ça s’trouve c’est un con ! Si ça s’trouve il va être chiant comme la carne ! Et… Et… Et puis j’ai pas envie de m’emmerder à des meeting où il faut rouler du cul ! Tu sais que j’aime mon calme et ma tranquillité, je n’ai pas du tout envie d’être sous les projecteurs ! A la limite à l’orchestre symphonique de la ville oui en tant que soliste mais pas sous ceux des journalistes ! J’ai vraiment pas envie ! Et c’est pas tout l’argent du monde qui me fera changer d’avis ! J’ai une fierté, une dignité quand même ! Et puis je trouve ça vraiment dégueulasse de ta part de profiter de mes problèmes d’argent pour me mettre dans une situation pareille !

Essoufflé, je m’arrête. Et encore une fois, un silence… On se connait depuis qu’on est tout petit, c’était un voisin de quartier et depuis le début, je sais que ses moments de blancs ne sont jamais bons signes… Par dans ce contexte, pas quand ça touche ses objectifs. Et rien, pas même ses amis, n’empêche Carl Kaufman d’avancer.

-Tu as fini ?
-…
-Tu auras un salaire estimé à 10 000 euros net .
-Di-di-dii… Dix-mille euros… Par… Par an ?

Carl grogna.

-Non par mois. Tu disais quoi, juste avant, j’ai pas tout compris, quand tu parlais d’être sous les projecteurs  et de profiter de mes amis ?
-…

Quand on est dans la merde, en manque d’argent au point où on sait qu’on va sûrement se retrouver à la banque de France, avec des dettes à régler dans tous les sens à a peine 24 ans, on pense alors aux solutions de faciliter. Certains y cédent, d’autres tiennent la barre. Moi j’ai réussi à tenir bon, incapable de me résoudre à faire les choses facilement : comme vendre mon corps. On a beau dire, que c’est une réplique lancée sur le ton de la plaisanterie à ses amis, il y a toujours un fond de vérité. Et là, Carl qui me propose un salaire mirobolant, exorbitant, que même dans mes rêves les plus fous, Je n’aurais pas imaginé. Et imaginer là qu’en un mois à peine, je pourrais éponger toutes mes dettes et qu’il aurait même du rab pour mettre de côté ou se faire plaisir… Même s’offrir un frigo rempli et ne plus manger ces immondes nouilles chinoises à 40cts le paquet… C’était quand même tentant…  Il va pleuvoir des poneys, c’est certain.

-Il… J’aurais quoi à faire, précisément.
-Juste bonne figure lors des meetings. Il faudra que ça ait l’air vrai bien sûr, donc ne pas hésiter sur des gestes d’affections comme un baiser chaste, une main sur celle de Brook, ce genre de chose, je pense que c’est dans tes cordes.
-Et… Et c’est tout ?
-Tu devras vivre avec lui, pour ne pas que ça fasse louche.
-Si… Si j’accepte, je veux la moitié maintenant, ça… ça m’éviterait de finir à la Banque de France…
-Parfait, je prends ça pour un oui. Il va falloir que Brook accepte et te vois. Je l’amènerais ici demain. En attendant, il faut que tu me signes le contrat que j’ai apporté pour toi.

Je me rassois, lentement, comme si j’allais faire sauter une mine.

-Je vais te le lire, fit Carl d’un ton toujours aussi monocorde
-Tu avais tout prévu hein ?

Carl commença à lire le contrat, sans même prendre la peine de répondre à ma question. Des fois, je me demande si nous sommes vraiment amis, je suis sans doute un peu naïf sur les bords mais quand il y a des limites à la connerie. Pendant qu’il me lit les clauses du contrat, je sens un mal de crâne commencer à tambouriner dans mon crâne avec un rire immonde. Je pâlis légèrement par moment mais au final, même si tout est assez carré et stricte, je pense pouvoir supporter ça. Et puis de toute façon, je n’ai pas le choix si je ne veux pas finir à jouer du violon sous les ponts, en partant du principe que les huissiers me le laissent.

A la fin, mon thé est froid et moi j’ai juste l’impression que les Spartiates et les Perses se sont battus dans ma boite crânienne.

-Et maintenant, c’est fini ? Je demande un peu épuisé.
-Oui. Tiens, voilà un crayon, tu signes en bas à droite de la page.

Il ne prend même pas la peine de me placer la main, il sait que je me débrouille. Avant que le crayon ne touche la feuille, j’hésite, un court instant, infime… Une voix hurle de ne pas signer, que ça pu les emmerdes à des kilomètres à la ronde. Mais Carl est mon ami, donc je pense bêtement que je peux lui faire confiance, qu’il ne m’embarquerait pas dans un nid à problèmes de son plein gré. Alors je signe, alignant les lettres sans lever le stylo, tenant la feuille, il n’y a que ce bruit qui grésille dans mes oreilles.

La dernière lettre à peine faite, la feuille est retirée et rapidement rangée dans l’attachée case de mon ami qui pose autre chose.

-Et j’ai déjà fait le virement sur ton compte bancaire pour l’avance, avec un petit plus.
-Que… Comment ça tu as déjà fait le virement ?! Et si j’avais refusé ? Je m’étonne, je ne comprends pas là.
-On s’en fiche, l’important c’est qu’on soit bien d’accord sur les termes du contrat. Ça m’arrange et ça te sort de la mouise. Tout le monde est content, c’est l’important, pas vrai ?
-Heu… J-Je suppose oui… Et bien merci alors…

Je ne sais pas pourquoi mais je trouve cela étrange… ça sent le coup foireux à plein nez… C’est trop beau pour être vrai… En tout cas l’affaire est entendue pour le moment, je ne réalise pas tout de suite, surtout que le téléphone de Carl se met à sonner comme s’il avait attendu que son propriétaire termine son affaire. Carl se lève et se penche pour me faire la bise.

« A demain alors. Je passerai avec Brook pour vous présenter.»

Je lui dis à demain aussi, sans vraiment réaliser ce qui vient de se passer… Du coup, je prends mon téléphone pour appeler ma banquière et savoir si Carl dit vrai, savoir si je suis toujours en train de creuser ma tombe ou si au contraire je sors enfin la tête de l’eau. Elle me le confirme.

Six mille euros.

J’en reste bouche bée et sans attendre la suite de ses commentaire, je raccroche, le visage levée avec une expression idiote sur le visage.

-YEEEEEEEEEES !!! YES ! YES ! YES !!!

J’en aurais presque pleuré de joie rien qu’à l’idée que tous mes problèmes vont s’envoler d’un coup de baguette magique. Sans attendre et me sentant comme le gagnant du grand loto, j’appelle les différents organismes pour tout payer cash. C’est un bonheur indescriptible de savoir que je peux lâcher des centaines d’euros sans friser la syncope. Après ça, j’enfile mon manteau et je file à l’agence immobilière pour tout régler également, me sentant léger ! Si léger ! J’avais l’impression que cela faisait une éternité que ça ne m’était pas arrivé, comme si je renaissais enfin de mes cendres. Emporté par mon enthousiasme insouciant, je file à la superette me prendre de quoi me faire un repas d’ogre, même si je ne finis pas tout, je m’en fiche. De retour à la maison, je me fais un bon repas, à m’en faire presque mal au ventre mais j’ai un sourire béat sur les lèvres à la fin.

Ce n’est qu’une fois dans mon lit, que je me demande quand même si tout ça n’est pas un peu trop beau… Mais vu comment je suis bienheureux, le ventre plein, la tête allégée de mes soucis, je souris comme un idiot.

-Ba, après tout il est peut-être pas si horrible que ça, ce Brook.

Par Chester - Publié dans : Politiquement incorrect -yaoï- - Communauté : Lawful Drug
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