On arrive
enfin. On déambule dans les allées, comme on le faisait jadis, si ce n’est que ce soir, j’ai l’impression d’être avec un parfait étranger.
« Viens »
et il me montre le pass de notre bungalow.
Lorsque
la porte s’ouvre, c’est comme si je faisais un bond dans le passé. J’hésite un instant puis, je rentre. J’ai tellement de choses à lui dire, j’ai tellement de souffrance au fond de moi,
tellement, que rien ne sort. Lui non plus, ne parle pas. Il s’est juste rapproché de moi. Il me prend dans ses bras et dépose un baiser sur mes lèvres. Léger. Puis un autre, et encore un autre.
Je le désire toujours autant, alors je l’embrasse, mais pas un baiser léger, un baiser profond, un baiser comme si c’était le dernier.
Lorsque mes
mains le déshabillent, je redécouvre son corps. Toujours aussi fin, toujours aussi féminin…et je redécouvre sa force lorsqu’il me plaque contre lui, lorsque je le sens, pas soumis du tout. Ma
bouche parcourt chaque centimètre de son corps, et lorsque je me m’empare de son sexe, il est surpris, recule légèrement puis…me laisse faire.
J’ai
toujours eu horreur de ça, sucer des bites, enfin, pas « des », la sienne. Un truc que je n’ai jamais réussis à faire de mon plein gré, il devait toujours me supplier pour obtenir un résultat
plus que médiocre…mais ce soir, j’aime le sentir remuer langoureusement, j’aime entendre les gémissements de plaisir qui s’échappent de sa bouche…j’aime lui donner du plaisir…
«
Tom…arrêtes…si tu continues, je vais éjaculer »
Ma main
prend le relais, le temps que je puisse lui parler.
« As-tu
envie que j’arrête ? »
«
Non…bien sûr que non, mais je sais qu’il y a des choses que tu n’aimes pas… Tom…pourquoi tu fais ça ? »
Je décide
de ne pas répondre et de continuer mais il me repousse.
«
Pourquoi ? »
« Elle ne
te suce pas ta fiancée ? »
« Si, et
elle avale »
« Ce soir
je la remplace…disons que ça sera ton cadeau de mariage »
Je sais
que mes paroles le blessent, mais moi aussi je suis blessé et je veux lui faire mal, autant que lui m’a fait mal en me mentant et en m’abandonnant. Ma bouche reprend possession de son sexe.
L’amour a fait place au ressentiment. Je le hais et il me donne le change. C’est un rapport de force qui s’installe. Au moment où il éjacule, je suis surpris et je recule, mais ses mains m’en
empêchent. Je me dégage, et me redresse. Arrivé à sa hauteur, je lui crache son sperme à la figure. Sans s’essuyer, il m’attrape et me pousse sur le lit. Son assaut me prend de cours, et je
m’affale sous lui. Un sourire féroce se dessine sur ses lèvres. Il m’embrasse. Le désir revient. Ma haine disparait. J’écarte doucement les cheveux qui cachent son visage. D’une main, je les
retiens tandis que de l’autre, je saisis un pan du drap, et je lui essuie le visage. Je m’approche doucement de sa bouche. Il est toujours méfiant mais, quand je l’embrasse, je sens sa résistance
fondre. Je l’embrasse et je le caresse. J’ai envie de lui, de son corps, de la façon indécente qu’il a de s’abandonner, de se donner. Subitement, tout s’efface, il ne reste plus que lui et moi.
Tout en l’embrassant, je le fais rouler sous moi. Je peux encore lire dans ses yeux qu’il ne m’a pas pardonné. Moi non plus d’ailleurs, mais je l’aime. Je l’aime a en crever.
« Viens,
beau blond »
Sa voix,
son corps, tout cela me fait mal. J’aimerai ne pas être là afin de ne pas avoir à souffrir demain, lorsqu’il sera reparti.
Il
s’offre, je glisse dans son corps. Sentiment éphémère de ne faire qu’un. La chaleur de son corps, les gémissements de plaisir, ses mains sur mes fesses qui rythment mes mouvements. Sa langue qui
caresse ma langue. Le plaisir qui explose au creux de mes reins. Je me retiens. Je ne veux pas que ce moment s’achève.
«
Tom…je t’aime………… » c’est un souffle qui fini dans mon cou. Je me déverse en lui. Ses paroles m’écorchent vif…alors que je me lève, il me retient.
«
Non, restes »
Je
me rallonge, silencieux.
«
Tu sais que tu suces vachement bien, beau blond »
Toujours
là où on ne l’attend pas. Je souris tout en lui donnant une tape sur l’épaule, mais mon sourire s’efface rapidement. Je n’ai pas le cœur à sourire. Je veux savoir pourquoi il m’a joué cette
mascarade.
On se fait face. J’attends son explication.
« Je
ne sais pas par où commencer… »
Je le
regarde sans parler. Il n’obtiendra aucune aide de ma part. Je reste muet. Il approche sa main et saisit une dread qu’il commence à tripoter. Il semble perdu dans ses pensées. Puis, il se met à
parler :
« J’avais
l’impression que tu avais honte d’être avec moi…je sais que tu n’as jamais accepté le fait de coucher avec un homme, et à la longue, cela a commencé à me peser, je souffrais de cette situation.
L’homme que j’aimais avait honte d’être avec moi, avait honte de coucher avec moi. C’était insupportable. Cette sensation de n’être jamais à la hauteur. De ne pas être la bonne personne. Je me
suis torturé un moment, puis j’ai compris que ce n’était pas moi le problème, mais toi. Tant que tu n’accepterais pas ce que tu étais et ce que tu aimais, la situation ne pourrait pas s’arranger.
Je me suis éloigné de toi, et tu n’as rien remarqué. L’œil toujours rivé derrière ton objectif, tu vis dans un monde de papier glacé, où tout est figé à jamais. Même moi, tu m’avais figé dans un
rôle que je ne voulais pas. Quand Dita m’a proposé cette mise en scène, j’ai accepté. Non, je ne l’aime pas mais, elle ne m’a jamais jugé. Elle m’accepte tel que je suis et elle sait que je
t’aime. Toi et personne d’autre. »
« Tu
me considère comme un monstre égoïste et sans cœur ? »
« Non, mais tu
te contentes de ce que tu vois. Tu ne vas jamais au fond des choses. La surface te suffit. Ta vie est une photo. Il n’y a qu’un recto, jamais de verso. Tu savais que les parents de Cindy étaient
toujours vivants ?non, évidemment. Il ne t’est jamais venu à l’esprit qu’ils avaient envie de connaître leur petit fils ? Non, bien sûr. Tom ne se pose jamais ce genre de question. A
quoi ça sert ? Avec Cindy et Bill, nous leur rendions visite lorsque tu te déplaçais à l’étranger. On vivait tous les 3, sur l’île de Dita. »
« Cindy était au
courant que tu étais vivant et elle ne m’a rien dit… »
« Je
lui avais fait jurer de ne rien te dire. À ce propos, j’ai promis à ses parents que le corps de leur fille serait rapatrié. Ils veulent qu’elle
repose près d’eux, avec ses ancêtres »
« Pas question
que tu touche à mon fils ! Je te préviens »
« Ton fils était
aussi mon fils, et c’était aussi l’enfant de Cindy ! Ne l’oublie pas ! »
Un
silence s’installe. Chacun est perdu dans ses souvenirs.
« Tu
ne sais pas aimer Tom. Tu n’as jamais su. Tu crois aimer les gens mais, tu les aime mal. Tu les fais souffrir. »
« Pourtant, je
t’aime. Je t’aime comme je n’ai jamais aimé personne… »
« Je
sais…n’empêche, tu ne sais pas aimer »
Ses mots
me font mal, mais je sais qu’il dit la vérité. Je sais que j’ai toujours eu du mal à accepter notre relation et l’amour que je lui porte n’y a jamais rien changé. Je voulais qu’il change aussi
afin de ne plus voir en lui ce que j’avais été. Je ne lui en veux plus de m’avoir quitté, à sa place, j’aurai fait la même chose. Je réalise que je l’ai fait souffrir, tout comme j’ai fait
souffrir Fiona et Cindy. Je passe ma main derrière son cou et je l’attire à moi. Je l’embrasse. Je le rapproche encore plus prés moi. Il n’offre
aucune résistance.
« Pourquoi tu ne
m’as pas tout simplement quitté ? »
« Parce que je
ne pouvais pas. Il fallait trouver une solution définitive. Quelque chose qui m’empêche de revenir vers toi »
« Mais tu es
revenu… »
« Oui, parce que
tu étais seul, et ça, je ne l’avais pas prévu. J’étais sûr que ta vie était toute tracée avec Cindy. Le destin en a décidé autrement. Si tu savais le nombre de nuits que j’ai passé à tes côtés, à
veiller sur toi quand tu étais dans la rue »
« C’est vrai
cette histoire de fiançailles et de mariage ? »
« C’est son
idée »
Je suis
toujours contre lui avec le sentiment qu’un fossé nous sépare maintenant. Je préférais le croire mort. La vraie souffrance s’insinue en moi.
Je
m’écarte de lui.
« Ça
va ? »
« Oui, j’ai
envie de fumer », en disant ces mots, je tâtonne à la recherche de mes clopes. Une fois le paquet attrapé, je me lève.
« Tu
peux fumer dans le lit »
« Non, j’ai
besoin de quitter ce lit, de me lever, de m’éloigner »
En
croisant son regard, je comprends que mes paroles lui font mal. Il doit encore se sentir rejeté. Je m’arrête près de lui
« Hé, j’ai juste
envie d’aller fumer à la fenêtre, rien d’autre. Ok ? »
« … »
Tout en
fumant, je regarde le ciel. Mon esprit est vide ou tellement plein qu’aucune pensée claire n’émerge. Je sens sa présence dans mon dos, je lui tends la clope mais il murmure :
« Tom…ton joli
p’tit cul me met dans tout mes états»
Effectivement, je
sens bien son ‘état’ posé contre mes reins. J’écrase ma cigarette dans le cendrier qu’il m’a apporté, et me retourne. Je suis quasiment assis sur le rebord de la fenêtre, il se tient entre mes
jambes. En souriant je lui dis :
« Je
crois que c’est ton tour »
« Tom et sa
façon très prude de me dire ‘baise moi’… ça ne va pas t’arracher la bouche, tu sais »
« Baises- moi
alors »
« Tu
vois, suffit de demander »