Je ne sais pas exactement à quoi je m’attendais. Sûrement à pire, vu les goûts de chiottes de Carl en matière de mecs. Il va s’en dire qu’il ne correspond absolument pas à mes critères habituels. Trop banal. Trop effacé. Trop…aveugle. A-veu-gle.
-Je suppose que c’est moi qui paie cet appart, donc, ce n’est pas chez toi mais c’est ton lieu de travail et par conséquent, le patron c’est MOI !!
Je l’entraine dans la première pièce qui se trouve à ma portée. Au passage, je pousse aussi Carl. Je lâche le mec à côté de lui et ne pouvant plus me contenir je continue :
-C’est quoi ce bordel ?!!! Tu vas me dire ce que signifie cette mascarade ? Parce que là, tu as fait fort !! Me dénicher un fiancé aveugle, je ne sais pas où tu l’as trouvé ton spécimen, mais bravo. Y’en avait peut-être plus des sourds et malentendants. Parce que je sûr que si tu avais pu, tu m’aurais pris un aveugle/sourd/malentendant. Le trois en un, pour faire pleurer dans les chaumières !!! Tu veux réécrire la biographie de Cosette ?!!! Tu te prends pour Victor Hugo ?!!! Rallier les pédés ne te suffisait pas, tu veux aussi rallier les amis des animaux et les détracteurs de la SPA. Je suppose qu’il a un clebs l’aveugle…et au point où on est…il n’aurait pas un cancer…un truc comme ça. Quand on est dans le pathos…autant y être à fond.
Carl va ouvrir la bouche mais, décide de se taire en voyant le regard que je lui lance. Je secoue la tête comme si ce geste pouvait faire disparaitre de mon champ de vision Carl et son acolyte. Je passe une main dans ma chevelure, tentant de reprendre mon calme tandis que je cherche désespérément une idée pour mettre celle de Carl hors service, mais rien ne vient. Trop de colère m’empêche d’avoir des pensées cohérentes. Faire diversion. C’est le truc qui me traverse l’esprit.
-Bon, hé bien, maintenant que nous avons fait connaissance, je boirais bien un verre d’eau moi. Les émotions, ça me donne soif. Carl, va donc me chercher un verre d’eau minérale, s’il te plait. Tu as l’air de connaitre cet appart comme ta poche…
L’ironie est à peine voilée.
-Je vais rester papoter avec mon …fiancé.
Je sens que ni Carl, ni le fiancé ne sont rassurés. Ils auraient du y réfléchir avant. Connaissant Carl et sa manie de tout contrôler, l’aveugle doit avoir un contrat de travail en béton. Ne voyant pas Carl bouger, je renchéris :
-Il arrive mon verre d’eau…minérale surtout. S’il n’y en a pas, il doit forcément avoir une épicerie dans le coin…
Il grommelle mais file dans une autre pièce tandis que je m’approche de mon…fiancé. Je le chope par le bras et avançant le visage près de son oreille afin que mes paroles ne soient entendues que par lui, je murmure :
-Quand à toi, mon ami, je ne sais pas ce que cet abruti qui me sert de directeur de campagne t’a dit, ni ce qu’il t’a fait signer, mais, crois-moi, je vais lire tout ça et rajouter toutes les clauses nécessaires. A partir de demain, puisque c’est le jour officiel de ta mise sur le marché, tu perds ton droit à l’image, ça, à la rigueur, ça ne changera rien pour toi, t’y vois que dalle. Tu perds tout tes droits. Tu deviens mon employé 24h/24h. Tu n’auras plus qu’un droit…m’obéir. Dernière chose, tu signeras une clause de confidentialité qui te fera perdre tout droit pour raconter ce qu’il s’est passé avec moi. Tu peux toujours essayer, mais, il y aura aussi une clause qui dira que si tu romps ton engagement, je te poursuivrais en te demandant des dommages et intérêts tels, qu’une vie entière ne te suffira pas pour payer maintenant, comme je suis magnanime, je te donne jusqu’à demain matin pour me sortir de ce guêpier dans lequel tu m’as mis en étant d’accord pour jouer ce jeu débile. A toi de trouver une solution. Je te laisse jusqu’à demain matin, 9h30. Heure de la conférence de presse.
Carl revient, le regard inquiet vers nous mais, je lui lance un sourire et susurre :
-Tu avais raison. Ce garçon est délicieux. Le premier malentendu passé, il fera un merveilleux fiancé. Regarde, il tremble de joie rien qu’à l’idée de passer du temps avec moi. N’est-ce pas touchant ?
Je m’empare de mon verre d’eau et le descends cul sec. Dans quel bordel je suis empêtré. En évoquant la durée, je me demande, combien de semaines devra durer cette mascarade. Pas le temps de m’appesantir sur le sujet. Je dépose le verre entre les mains de Sebastian et annonce :
-Il se fait tard. Demain, la journée sera longue pour nous tous.
Je pourrais aussi rajouter, éprouvante et sûrement, pleine de mauvaises surprises mais je préfère me taire. La tension est déjà palpable. Nul besoin d’en rajouter une couche.
Carl, toujours dégoulinant de politesse, murmure quelques mots à l’oreille du brun tandis qu’en ce qui me concerne, j’ai simplement envie de les étrangler tout les deux.
Alors que je vais franchir le seuil, je fais un pas en arrière, me poste devant Seb, pas mal ému après ma déclaration d’affection, et je lui roule une pelle avant de partir, sans rajouter un mot. Autant lui donner de bonnes raisons de se creuser la cervelle pour trouver une idée.
***
Pendant que Carl et Brook rejoignaient la voiture, dans l’appartement…
Seb n’avait pas bougé. Tétanisé par la tornade qui s’était engouffré chez lui. Immobile. Les pensées tourbillonnant tellement vite qu’il en avait le tournis. Il entendit des pas dans la cage d’escalier et soudain, son rythme cardiaque s’accéléra en imaginant que ce taré puisse revenir le menacer. Il sursauta lorsqu’il entendit une voix et mit plusieurs secondes avant de réagir. Il ne s’agissait que de son voisin, monsieur Mathurin, qui descendait son chien pour la promenade du soir. S’il avait été dans son état normal, il aurait entendu les pas descendre, et non monter. Il aurait aussi entendu, les griffes de Zeldor tapotaient sur les marches. Un petit son caractéristique, qui d’ordinaire, le faisait sourire.
-Tout va bien monsieur Luis ?
Son voisin s’était arrêté sur le palier, voyant la porte grande ouverte.
-Monsieur Luis ?...
On sentait dans sa voix une pointe d’inquiétude et Seb du faire un effort pour reprendre une contenance. Il s’approcha, d’un pas hésitant, car, il ne savait plus trop où il se trouvait exactement, se fiant à la voix et aux gémissements du chien pour avancer.
-Oui, ne vous inquiétez pas. Je vais bien merci. Bonne promenade.
Il réussit à franchir la distance qui le séparait de sa porte d’entrée et alla la fermer. Quand il fut seul, il réalisa qu’il tremblait de colère et sans réfléchir, il se rua vers la fenêtre qui donnait sur la rue, l’ouvrit et hurla :
-Sale enfoiré !!!
Mais l’unique réponse fut le bruit de la berline qui s’éloignait. Brook était déjà loin. Seul, monsieur Mathurin releva la tête, haussa un sourcil surpris devant l’attitude habituellement si polie et réservée du musicien. Puis, il vit la lune et secoua la tête en signe de fatalité. Décidément, la pleine lune pouvait changer un homme.
Nerveusement épuisé, Sebastian s’affala sur son canapé et passa une main lasse sur son visage. Tout cet argent était trop beau pour être vrai. Il aurait dû s’en douter mais, comme un imbécile et trop heureux de pouvoir enfin sortir la tête de l’eau et laisser derrière lui ses problèmes de fric, il s’était empressé de régler certaines factures…il avait agit trop vite et maintenant, il était coincé.
Sa tête tomba entre ses mains. Il avait beau chercher une solution, il n’en voyait aucune. Fuir, peut-être…et rembourser Carl au fur et à mesure. Il était vraiment dans une sale situation et l’autre taré qui lui intimait de trouver une solution, il en avait de bonne…
Il s’imagina encore une fois prendre la fuite. Changer de nom et disparaitre puis, secouant la tête, il se mit à ricaner tout en se traitant d’idiot.
Carl l'avait bel et bien eut...
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