Mardi…
Je suis en position depuis plusieurs minutes déjà. Steven aussi. La cible arrive, entourée de ses gardes du corps. Quatre en tout. Il est sorti de la voiture et je suis chacun de ses mouvements au travers de mon viseur.
« Aucun regret ? »
« Aucun »
J’ajuste mon arme. Premier tir, il s’écroule. Deuxième tir, un garde du corps s’écroule à son tour. J’ai remballé mon matériel. Je quitte l’endroit, empruntant d’interminables couloirs, descendant des centaines de marches pour me retrouver quelques pâtés de maison plus loin. Je retrouve l’agitation de la rue. Me fonds dans la masse. Passant anonyme. Mission accomplie. Je pense à Amélia.
Je suis dans mon appartement. Il m’a rejoint. On est silencieux. Je le laisse un moment pour revenir avec une paire de ciseaux. Je les lui tends.
« Coupe »
« Je ne suis pas coiffeur »
« Coupe »
« J’aime tes cheveux »
« Coupe je te dis. Ils repousseront »
« Brian… »
« Je les laisse pousser depuis que j’ai quitté l’armée. Je commence une nouvelle vie. Je me libère de mon passé. Alors, coupe !!! »
Il soupire puis se met à la tâche. J’entends le crissement des lames avancer péniblement dans la masse argentée. En baissant les yeux, je vois les mèches s’amonceler sur le sol. La sonnerie de son portable. Il décroche. Prononce quelques mots.
«Je finis et je files »
Seul le bruit du ciseau résonne dans la pièce.
« Voilà »
Je passe une main dans ce qu’il me reste de cheveux. Je souris. Étrange sensation.
« Merci »
Il incline simplement la tête, remet sa veste et part.
***
La journée touche à sa fin. Avant de rejoindre Steven à la marina, je suis allé faire un tour chez un coiffeur. Un vrai, cette fois. Le résultat me plait. C’est comme si un nouveau Brian était né. En arrivant au restaurant, je vois que ma nouvelle coupe laisse Steven perplexe.
« Brian, tes cheveux… »
« Ça repoussera »
« …j’étais tellement habitué à te voir avec tes cheveux longs… »
Je lui souris.
« C’est du passé…alors…le fric est sur notre compte ? »
« Oui. J’ai transféré l’argent, clôturé les comptes, détruit toutes traces de nos anciennes activité. Nous n’existons plus »
« Parfait »
***
Les jours suivants, je retourne à mes activités. Je peaufine l’exposition de Ruby. La presse est enthousiaste même si la nouvelle de la mort du magnat de la finance, Erik Jansen, fait la une des journaux. Une enquête est ouverte mais, l’homme n’ayant pas que des amis dans le milieu des affaires, le nombre des suspects est impressionnants…autant que la foule qui se presse lors de ses funérailles. La mère d’Evan, droite et silencieuse. Amélia lui tient la main. Je m’approche et présente mes condoléances. Amélia va ouvrir la bouche, mais je lui fais signe de se taire. Je me baisse à son niveau, l’embrasse et lui murmure :
« Ils vont repousser »
Je me relève, sers d’autres mains puis, me poste un peu plus loin. Le regard rivé sur sa silhouette. J’ai fait ça, pour lui. Par amour. Pour ne pas le perdre. Pour ne plus jamais perdre un être que j’aime. Je repense à ce fameux dimanche soir, où malgré les engueulades de Steven, j’ai tout raconté à Evan. Je lui ai dit que j’étais tueur à gage à mes heures perdues et que mon prochain contrat, c’était lui. Lui que son cher papa voulait liquider pour récupérer Amélia et la société. Je lui ai raconté comment, grâce à Amélia il avait eu la vie sauve, la première fois. Que c’était le destin, mais que si je ne respectais pas le contrat, son père trouverait d’autres personnes pour le descendre. Il pouvait fuir, mais tôt ou tard, il serait rattrapé et tué. Pour qu’il puisse vivre tranquillement, on devait se débarrasser de lui. J’ai eu peur de le perdre mais il a accepté. Le lendemain, Steven s’est chargé de lui expliquer nos plans. Evan était à mes côtés lorsque je l’ai abattu. Il a vendu ses sociétés. Il est maintenant avec nous. Sur nos projets. Nous avons décidé de nous installer en Inde. A Pontdicherry. Nous voulons créer des usines de tissage d’un côté et de confection de l’autre. Johanna a toujours rêvé de créer des vêtements pour enfants. Elle a pleins d’idées. Jo en créatrice, Evan en gestionnaire, Steven en banquier, moi en VRP et Amélia en essayeuse et donneuse d’avis sur les futurs modèles. Chaque membre de notre famille a un rôle dans notre future vie. Steven s’est occupé de nos futurs lieux de vie et usines tandis qu’ici, on réglait les derniers détails.
***
Plusieurs mois après…
Du coin de l’œil, je l’observe. Elle sourit. Propose des boissons. Des couvertures. Elle sourit. Elle me sourit beaucoup aussi. Elle est belle et baisable. Un regard sur ma gauche. Il dort. L’hôtesse s’approche. Son sourire s’agrandit.
« Vous désirez quelque chose? »
Je m’apprête à lui répondre lorsqu’une main se pose sur mon avant-bras :
« Demandes-lui une couverture mon ange »
Un large sourire vient barrer mon visage. Je fais un petit signe désolé à la charmante hôtesse et dit :
« Pourriez-vous apporter une couverture. C’est pour mon chéri. Il est frileux. Merci beaucoup »
Au mot ‘chéri’, elle a pâlit. Désolé ma belle, je n’irais pas te culbuter dans un recoin de l’avion. Je suis un homme ‘casé et fidèle’. Tandis qu’elle s’éloigne, je tourne la tête vers Evan.
« Tu ne me fais toujours pas confiance ? »
« … »
« Evan bordel, il me semble t’avoir prouvé par mon geste que je tenais à toi… »
« … »
« Tu fais chier, tu le sais ? »
« Excuses-moi »
Je passe ma main derrière sa nuque et l’attire d’un coup sec vers moi.
« Je t’ai… »
« Monsieur votre couver… »
« Poses-la là et dégages »
« Mais… »
Je détache mon regard des prunelles noires d’Evan pour la dévisager.
« Je suis occupé alors…je n’excuse plus, j’exécute »
Elle se recule et déguerpit. Je reviens sur Evan. Ma main reprend sa place sur sa nuque mais cette fois, je l’attire doucement vers moi.
« Je n’aime que toi. Ne désire que toi. Je peux te le prouver sur le champ… »
« Ce ne serait pas convenable »
« Tu crois ? »
Je me lève, le saisit par le main et l’entraine vers les toilettes.
« Messieurs, vous ne pouvez pas entrer à deux dans les toilettes, c’est interdit. Messieurs, vous ne pouv… »
Pendant qu’elle parle dans le vide, j’ai poussé Evan à l’intérieur. L’hôtesse tape contre la porte que je viens de fermer. Je la réouvre et sors la tête :
« C’est bien chérie, continue à taper contre la porte, cela couvrira les gémissements de mon mec »
D’un geste je referme la porte.
« Par ici beau brun… »
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