Pendant le repas, je ne parle pas. Je mange. D’ailleurs personne ne me parle. Avant le dessert, je me lève en leur montrant mon paquet de clopes. Un échange de regard avec ma grand-mère. Elle se tait.
***
Je me demande ce que j’ai bien pu faire pour qu’il m’abandonne. Qu’il aille vers une autre. Une fois le mégot écrasé sur le sol, je rentre, sans faire de bruit, sans me faire remarquer. Je monte. Je gagne notre chambre. Et là, l’odeur. Son odeur. Celle de son parfum. Je m’approche du lit, rejette tout sur le côté. Les draps sont froissés. J’approche mon visage de l’oreiller. Une odeur s’en dégage. Son parfum. Celui que nous avons choisis ensemble. Je souris. Il ne dort pas chez cette femme. Il dort ici, dans son lit. Seul. Après un regard sur le crucifix placé au-dessus du lit, je redescends.
***
« Eve, veux-tu du gâteau au chocolat ? »
Tout en souriant, je fixe ma grand-mère. Un combat sans merci vient de s’engager. Je compte bien en sortir vainqueur. Je me place derrière Greg. Alors qu’il va porter un morceau de gâteau à sa bouche, je détourne la fourchette, et je goûte.
En souriant, je regarde mon père.
« Il est bon mais …je n’ai plus faim »
Une fois la micro bouchée avalée, j’embrasse mon père sur la joue tout en passant mes bras autour de son cou.
« Eve, laisses ton père manger en paix »
Le ton de ma grand-mère est sans appel.
Je me colle un peu plus. Toujours souriante.
« Tu veux que je te dise Anaïs, le plus beau cadeau que tu m’ais fait, c’est ton fils »
Ma grand-mère manque de s’étrangler. Je murmure :
« Je t’aime Greg. »
Et je dépose un baiser dans son cou.
« Eve ! Ce n’est pas une façon de se conduire ! Tiens-toi correctement s’il te plait »
«Au fait, je ne t’ai pas dit…je suis allée me confesser…et Dieu m’a pardonné »
Elle a pâlit. Ses doigts se sont crispés sur sa serviette.
« Eve ! Comment oses-tu ?! »
« Et toi, si pieuse, comment oses-tu remettre en question la loi de Dieu ? »
Elle se lève d’un bond. Livide.
« Eve, excuses-toi »
Greg vient t’intervenir.
« À une condition, que tu reviennes à la maison »
Petit signe affirmatif de la tête. Sourire triomphant pour moi.
« Je te prie de bien vouloir m’excuser mamie »
« Bon, allez ! Vous n’allez pas vous chamailler pour si peu. Anaïs, acceptes les excuses de la petite »
Papi se réveille. Elle est obligée d’accepter. J’ai gagné la partie.
***
La confession. J’ai découvert ça… par hasard. Je trainais dans une église. Absorbée par la contemplation des vitraux, je m’étais assise sur un banc. Je ne l’ai pas vu venir, ni se pencher vers moi. Sa voix m’a fait sursauter. Il s’est excusé. On a parlé. Après quelques minutes, je lui racontais ma vie, sous le secret de la confession. Il voulait que je prie. Je l’ai prié de le faire pour moi. Dieu a effacé mes péchés. Je pouvais recommencer.
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